Nous allons voyager, Mon Amour, et les mensonges seront sur le pont du bateau noir. C’est incongru, il me souvient ce soir, que tu voulais traverser l’Atlantique sur un cargo à bananes, à autre chose, à illusions.
Demain, un autre jour, jamais, nous regarderons l’aube anorexique mourir dans les vagues et dans nos enfers à quai. Ah, Mon Amour ! Il pleuvra dans tes yeux, parfois, parfois seulement, rarement, des averses de crocodile. Qu’importe si tu fais semblant, comme toujours. Cela me rassurait quand tu faisais semblant. Les mensonges tricotent des mitaines et je te promets, je le vendrai, je le vendrai, notre amour qui ne vaut rien, aux enchères des banquiers impuissants quand nous serons au bout du voyage.
Mais Mon Amour, Mon Pauvre Amour, Mon Véritable Amour, au bout du voyage, nous y sommes quasi !
Ma chair tombe en miettes de ma jeunesse sèche; vanité, memento mori. Et toi, Chéri, des branches mortes qui te sont venues à la place de ces mains que j’ai tenues, sur lesquelles j’aurais dû pleurer, pour y laisser comme une alliance adultère. Des branches mortes…les mêmes que celles qui étaient venues à ton cœur immobile, il y a si longtemps !!
Mais, maintenant !! Ces doigts de platane quand tu joues Debussy sur un piano désaccordé !!
Et nous qui ne sommes même plus accordés au diapason des tendresses !!
Ne restons pas là, sur le pont, Mon Amour. Les mensonges ont une érection fugace. On aperçoit déjà les côtes à feu et à sang. Ne restons pas là, Mon Amour ! Les goélands de haute mer vont bouffer ce qui reste de ton regard qui ne me regarde pas.
Et je vais finir, pour tuer le temps, par me jeter pour de bon, dans le sillage blanc d’écume nuptiale et de sperme que le navire abandonne derrière lui, quand il viole l’océan, en toute impunité.
Mon Dieu, qu’est-ce que j’ai pu t’aimer ! Il re reste plus rien, pas même une gorgée de sable !!
Musique de fond : The Sound of the Silence/ Version de Disturbed.
